Alors que le gouvernement français vient de rendre onze vaccins obligatoires, des voix s’élèvent pour faire part de leur indignation et de leur colère. Une communauté anti-vaccins s’est créée sur les réseaux sociaux et cette dernière gagne en visibilité.
Qui compose cette communauté ?
Qui sont les porte-étendards de cette cause ?
Quels sont leurs arguments ?
Les tweets ont été récupérés entre le 1/11/2016 et le 1/11/2017
Les tweets ont été récupérés via le logiciel de veille Brandwatch et devaient répondre à deux critères : (1) être écrits en français ; (2) Contenant des mots-clés généraux en lien avec les vaccins ou des mots-dièses spécifiquement identifiés (#vaccinolatres, #LibertéVaccinale etc.)
Le mouvement anti-vaccins existe depuis la découverte de la vaccination par Louis Pasteur. Cependant, la méfiance des français à l’égard de la vaccination n’a jamais été aussi haute. Dans un sondage réalisé par ODOXA auprès de 1011 français, 39% des sondés estiment que les risques encourus par la vaccination sont supérieurs aux bénéfices. C’est 12% de plus qu’il y a deux ans.
Dans ce contexte, il est important de comprendre le fonctionnement et la composition de la communauté anti-vaccins présente sur Twitter, dont les arguments semblent se propager rapidement.
Cette cartographie illustre la diversité d’acteurs qui se sont exprimés sur la vaccination au cours de la période étudiée.
Les communautés excentrées sont composées par les leaders anti-vaccinalistes qui se mettent à l’écart des discussions pro-vaccination, afin de s’assurer un confort dans leur bulle informationnelle.
Les comptes institutionnels ainsi que les grands médias sont ceux qui centralisent les conversations, ce qui montre que la majorité des acteurs considère qu’il s’agit des références sur la thématique. Cela confirme aussi l’intérêt grandissant du sujet au sein du pôle médiatique.
Cette deuxième cartographie illustre les rapports entre les acteurs utilisant des arguments anti-vaccins et les utilisateurs discutant de la vaccination en général.
Les conversations techniques sont menées par des communautés plus périphériques comme le monde médical et les instituts de recherche. Ces derniers entretiennent une relation proche avec les médecins. Les professionnels du monde médical restent à l’écart des personnalités politiques qui semblent soutenir des arguments anti-vaccins.
Seuls les comptes humoristiques et satyriques entretiennent, de par leur nature, une relation de proximité avec la communauté d’étudiants en médecine.
Enfin, les pharmaciens composent la communauté la moins sensible aux arguments avancés par les anti-vaccins.
La vaccination faisant l’objet d’un consensus social depuis des décennies, les acteurs pro-vaccins ne s’inscrivent pas autant que leurs adversaires dans une logique activiste. C’est la raison pour laquelle cette communauté apparaît beaucoup moins clivée et plus homogène.
Parmi ces acteurs, les médias généralistes et spécialisés jouent un rôle unificateur.
Ce classement nous montre que malgré une certaine propagation des arguments anti-vaccins sur Twitter, le mouvement reste submergé au sein d’une masse conversationnelle beaucoup plus grande et positive puisque seuls trois profils anti-vaccins sont présents dans ce top 10.
Lorsque nous analysons les forces en présence, nous remarquons qu’un large pôle public et politique utilise les arguments pro-vaccination. Les étudiants en médecine tout comme les pharmaciens soutiennent exclusivement ces arguments.
De l’autre côté, les idées anti-vaccins sont utilisées en nombre par les contestataires et conspirationnistes adeptes des théories du complot. Les souverainistes tout comme l’extrême droite française et le parti européen EELV sont plus modérés dans leur utilisation des arguments antivaccinalistes.
Les données analysées sont réparties de manière non-équilibrée sur l’année étudiée. En effet, ce sont les déclarations du gouvernement français visant à rendre onze vaccins obligatoires – à la place de trois – qui ont mis le feu aux poudres et ont rythmé la deuxième partie de l’année.
L’été 2017 a été marqué par deux déclarations consécutives : celle de la ministre de la Santé Agnès Buzyn et celle du Premier ministre, Edouard Philippe, lors de sa déclaration de politique générale. A eux seuls, les mois de juin, juillet et août ont rassemblé près de la moitié des données récoltées (140.208 tweets).
Le 16 juin 2017, la ministre de la santé Agnès Buzyn annonce dans Le Parisien envisager de porter à onze le nombre de vaccins infantiles obligatoires. Jusqu’à présent, seulement trois vaccins étaient obligatoires pour les moins de 18 mois.
En quelques heures, les réactions négatives à l’encontre de la ministre comme les liens qu’elle entretenait avec les laboratoires pharmaceutiques se propagent. D’abord dénoncés par de simples internautes, ces liens sont surtout relayés par des personnalités politiques de la gauche écologiste. La députée européenne Michele Rivasi prendra part au débat et deviendra dès cet instant, avec les militants écologistes, un compte important dans le relais des arguments anti-vaccins.
Le 04 juillet 2017, le Premier ministre Edouard Philippe confirme lors de sa déclaration de politique générale à l’Assemblée Nationale la volonté du gouvernement d’augmenter à onze le nombre de vaccins obligatoires.
Le lendemain, la ministre de la Santé détaillait lors d’une conférence de presse la mise en place de l’obligation vaccinale.
Nicolas Dupoint-Aignan ainsi que des représentants du Front National et de la France Insoumise prennent la parole et se positionnent immédiatement à l’encontre de l’obligation vaccinale, en soulignant cette fois encore l’argent que cette mesure rapportera aux laboratoires.
Le profil type d’un acteur anti-vaccin est un homme âgé entre 45 et 50 ans dont ses affinités politiques sont proches de (l’extrême)-droite ou des écologistes. Il s’intéresse aux sciences, aux technologies et exerce dans le secteur scientifique, de la recherche ou médical.